Monsieur le président de la République,
Depuis que j’ai l’âge de voter, j’ai toujours accordé mes suffrages à la gauche. Mes parents votaient à gauche. Mes grands-parents votaient à gauche.
Lors des dernières élections, j’ai voté pour vous. Pour être tout à fait honnête, j’ai surtout voté contre Nicolas Sarkozy, comme beaucoup de Français, car je pense que depuis un certain temps déjà (1983), le P.S. n’est plus à gauche. Et votre gouvernement nous le prouve depuis qu’il est au pouvoir.
J’entends vos ministres déclarer dans les medias que si le peuple français a voté pour vous, c’est qu’il a voté pour votre programme en son entier. Tenir de tels propos, c’est tomber dans la facilité. En 2002, 82% des Français - dont vous-même - ont voté pour Jacques Chirac et je ne pense pas que tous plébiscitaient ainsi son programme dans son intégralité.
Ce qui se passe en ce moment à Notre-Dame-des-Landes est scandaleux, ignoble, indigne d’un gouvernement qui se prétend démocrate.
Votre ministre de l’intérieur (si populaire auprès des électeurs de droite !) a traité de « kyste » les opposants à l’aéroport.
Votre premier ministre a déclaré qu’il ne voulait pas se laisser imposer la vision du monde de celles et ceux qui contestent son projet.
Mais depuis l’accession du général de Gaulle au pouvoir, ce sont les gouvernements successifs qui nous ont imposé leur vision du monde : énergie nucléaire, cadeaux fiscaux aux riches (merci à monsieur Bérégovoy), privatisations des biens publics (dont le champion a été Lionel Jospin), etc.
Aujourd’hui, selon de nombreuses personnes, les projets inutiles, coûteux et qui ne tiennent aucun compte des changements du monde (réchauffement climatique, disparition des énergies fossiles, etc.) ne sont plus de mise. Des scientifiques éminents, les écologistes et tout individu sensé qui sait que nous vivons dans un monde fini - lequel ne peut croître indéfiniment, n’en déplaise à votre premier ministre - le proclament haut et fort.
A l'heure des défis alimentaires et énergétiques à relever, au moment même où se tient à Doha la conférence sur le changement climatique – d’où il ressort qu’il faudra produire mieux avec moins - le gaspillage de la terre agricole qu’entraînerait la poursuite du projet de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes est insupportable. La terre arable, la terre nourricière est un bien à préserver et non à massacrer, à bétonner. Il ne suffit plus de parler de préserver les espaces agricoles, comme cela est écrit dans tous les projets d'aménagement et de développement durable, il faut le faire !
De nombreux jeunes veulent devenir paysans, veulent travailler dans et avec la nature, veulent cultiver la terre, veulent produire pour approvisionner les marchés de proximité ou les cantines scolaires, nourrir leurs voisins, participer au développement économique de leur territoire, développer des projets de vie basés sur la relocalisation.
Alors pour eux, pour nos enfants, pour tous ceux qui veulent continuer à vivre de la terre, je refuse avec bien d’autres ce nouvel aéroport d’autant plus qu'il en existe déjà un à Nantes, lequel peut être aménagé pour répondre aux besoins d'échanges actuels et à venir : en l'occurrence l'aéroport de Nantes Atlantique avec ses 320 ha peut accueillir un trafic de plus de 10 millions de passagers, comme c'est le cas de nombreux aéroports internationaux. A l'inverse, combien de terres nouvelles seront nécessaires et viendront encore s'ajouter aux 1650 ha prévus pour satisfaire aux besoins des accès (ferroviaire ou routier), des infrastructures complémentaires, pour de nouveaux aménagements ?
Il conviendrait de répondre sincèrement à cette question.
Il est encore temps d'arrêter l'escalade, d'arrêter cette fuite en avant !
Votre ministre de l’écologie (!!!) a déclaré que « la commission de dialogue » instaurée par votre premier ministre ne fera pas changer d’avis le gouvernement et que l’aéroport sera construit quoi qu’il en soit.
A quoi sert un « dialogue » dont on connaît déjà l’issue ?
A se moquer des gens !
Pour toutes les raisons exposées ci-dessus, j’ai décidé de déchirer ma carte électorale dont je vous joins les morceaux à ce courrier.
Je vous prie d’agréer, monsieur le président de la République, mes salutations responsables, citoyennes et atterrées.
P.S. : Mon prochain bulletin de vote :
JE VOTE BLANC
Ce qui veut dire que je ne m'abstiens pas, je ne me trompe pas,
MON VOTE N'EST PAS NUL, JE PROTESTE :
TOUS les candidats me semblent DANGEREUX.